Si tout le monde n’était pas encore convaincu des liens étroits entre l’Ecosse et l’Espagne, le repas chez Tendido Sol aura fini par les raisonner.
Le temps aura été clément avec nous puisque c’est dans le patio découvert que nous avons pu profiter de la soirée.

APÉRITIF
Après un « faux départ »au bar autour d’un verre de rosé et d’une assiette de pata negra, la dégustation a réellement commencé avec le Platte Valley - Corn Whiskey et les croustillants de girolles.
Contrairement au Bourbon, ce corn whiskey à plus de 80% de maïs n’a pas été vieilli en fût neuf.
Couleur : jaune pâle à reflets verts.
Nez : frais, mentholé. Epicé (poivre, noix muscade). Révèle la douceur du maïs et de fines notes vanillées.
Bouche : grasse, onctueuse. Confirme le nez. Veloutée, fruits compotés (poire, prune). Végétal (épi de maïs).
Finale : crémeuse. Elle évolue avec délicatesse sur le maïs, la vanille et la noix de pécan.
Il faut reconnaître que ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de déguster un corn-whiskey et l’associer à un met nous a semblé être un premier challenge intéressant.
Le croustillant de girolle au beurre, la sauce vanille et café ont parfaitement répondu à la douceur légèrement épicée du Platte Valley.
A défaut de reproduire cet accord, il est ressorti de façon quasi unanime qu’il sera une excellente surprise à faire découvrir à l’apéritif.

ENTRÉE
Springbank 10 ans - Campeltown et Tartare de morue, chips de chorizo, crème fouettée au whisky.
Depuis sa création en 1828, la distillerie est toujours restée la propriété de la même famille et à cette époque il y avait une trentaine de distilleries sur l’île pour 1969 habitants.
Produisant des malts très tourbés à ses débuts, c’est au milieu du XIX siècle qu’elle fût une des premières de la région à sécher en partie son malt au feu de charbon. On peut noter qu’elle est une des dernières à produire 100% de son malt et que les fermentations sont très lentes (70h).
La distillerie produit 3 malts différents: Le premier porte le nom de Springbank, et est distillé deux fois et demie... Le malt est séché durant 6 heures au-dessus d'un feu de tourbe, et ensuite durant 24 heures à l'air chaud. Le résultat en est un single malt légèrement tourbé.
Pour la distillation, le wash est distillé une première fois, et le corps de la distillation est séparé de la tête et des queues de distillation.
Ensuite, une partie des low wines ainsi obtenus est redistillée, avec ici encore séparation des têtes et queues de distillation.
Les feints ainsi obtenus sont ensuite distillés dans le spirit still avec les low wines de la première distillation.
La maturation se fait dans divers types de fûts: bourbon, refill, rhum madeire ou sherry.
Le second malt produit par la distillerie s'appelle Longrow, du nom d'une ancienne distillerie voisine fermée en 1896, et dont le dernier chai resté debout abrite la chaîne d'embouteillage de Springbank. Ce malt est séché entièrement au-dessus d'un feu de tourbe, et le goût de ce whisky est donc nettement plus prononcé. Le Longrow subit une double distillation classique.
A l'heure actuelle, le Longrow est commercialisé dans sa version de 10 ans d'âge, mais une version 15 ans est prévue dès que le malt aura atteint cet âge. La production de Longrow a redébuté en 1987. Le Longrow est exclusivement porté à maturité dans des fûts de type “refill” (réutilisés).
En 1996, la distillerie a commencé la distillation d'un troisième malt dont la première version a été commercialisée sous la forme d'un 8 ans, et qui s'appelle Hazelburn, du nom d'une autre distillerie qui ferma définitivement ses portes en 1925. Le malt destiné à la production du Hazelburn est exclusivement séché à l'air chaud et leur maturation se fait à 100% dans des fûts de Bourbon.
Environ 70% de la production est commercialisée sous forme de single malt, le reste entrant dans la composition des assemblages Campbeltown Loch et Mitchell 12 ans.
Couleur : or pale
Nez : complexe, charmeur, fruité (prune, agrume, pomme), une pointe de vanille et de noix de coco (typique de Springbank). Légèrement végétal et médicinal à l’ouverture.
Bouche : attaque vive, épicée, directe, un peu sur le caoutchouc puis la céréale (malt vert) et enfin l’iode et un coté salé.
Finale : longue et salée, douce amère, florale pour certains, huileuse et soulignée par un joli boisé discret (chêne).
Chaque élément de cette entrée semblait avoir trouver son doublon dans le whisky : morue - iode, chorizo - épices douces, crème fouettée – finale douce et huileuse.
Une gorgée de l’un appelait une bouchée de l’autre, la fraîcheur semblant être le facteur commun entre les deux .

PLAT
Benriach 12 ans - rhum finish - Speyside et papillote de chou vert, poitrine fumée et foie gras.
La distillerie Benriach fut créée en 1898 par John Duff, après avoir créé un an plus tôt la distillerie Longmorn et créé la société The Longmorn Distilleries Company Ltd. John Duff fut contraint de se séparer de ses deux distilleries deux ans après leur création.
Les nouveaux propriétaires décidèrent de fermer l’une des deux. Leur choix tomba sur Benriach. La distillerie cessa de produire durant 65 ans, mais les surfaces de maltage restèrent en activité.
Longmorn se fournissait ici pour sa production de malt. Les besoins en malt de qualité de la région de Speyside poussèrent à la réouverture de la distillerie Benriach en 1965, après une rénovation complète, parce qu’elle avait été entièrement démantelée lors de sa fermeture en 1900.
La compagnie fut engloutie par Seagram Distillers en 1978. Seagram, également propriétaire de Strathisla procéda au doublement du nombre d’alambics en 1985 mais mit la distillerie en sommeil en 1999 à cause de la crise en Asie qui avait une influence négative sur les ventes de whisky dans cette région du monde.
Les distilleries du groupe "The Chivas and Glenlivet Group" appartenant à Seagram ont été rachetées par le groupe Pernod-Ricard le 19 décembre 2001.
Le malt est en grande partie utilisé dans les blends du groupe, à savoir Chivas Regal, 100 pipers, Queen Anne et Something Special.
Le groupe Pernod-Ricard a revendu la distillerie en mai 2004 à un groupe Sud-Africain, Intra Trading, dirigé par Billy Walker, ancien directeur de Burn Stewart pour 5,4 millions de livres.
Nez : rond, pas très complexe mais fin et nettement marqué par la tourbe, le rhum, fraîcheur herbacée, haddock fumé et la cendre.
Bouche : attaque vive et nette, sèche (feuille et terre), les cotés tourbés et floraux du milieu de bouche laisse la place à un peu de bois sur le retour.
Finale : longue, sur la tourbe et le rhum, rugueuse et atypique.
Sans doute l’accord le plus difficile à réaliser mais que certains ont réellement apprécié. Il est vrai que le gras du plat faisait comme une barrière entre les arômes du whisky d’un coté et ceux de la papillote de l’autre. Un poisson aurait peut-être plus approprié mais la viande faisait partie des rares exigences demandées au chef.
Un dram parfait pour entretenir la polémique sur les affinages et les lieux de provenance (un speyside assez tourbé), certainement très différent comme style, mais quand même typé whisky.

DESSERT
The Hot Irishman et trio de biscuits et son coulis de chocolat amer.
Nous avions découvert Irishman lors de notre soirée de mars sur les whiskeys irlandais et je ne reviendrais donc pas sur la distillerie.
La particularité de ce produit réside dans le fait qu’Hot Irishman est la conjugaison des meilleurs ingrédients pour l'Irish Coffee : de l'Irish Whiskey, du café colombien très torréfié et du sucre brun irlandais.
Il a suffit de verser de l'eau bouillante et de rajouter ensuite un peu de crème pour obtenir un Irish Coffee.
Chaque biscuit avait une saveur différente (pomme, ananas et gingembre) et rappelait ainsi les fruits jaunes que l’on retrouve dans une bouche de whiskey, le coulis de fruit rouge quant à lui nous renvoyait au nez d’un redbreast. Enfin le chocolat amer rehaussait le coté torréfaction et la crème enrobait tout ceci pour nous laisser une agréable saveur de gourmandise.

DIGESTIF
Suntory royal 12 ans - Nikka - Japon et Roméo et Juliette
Une fois encore nous sommes allés faire un tour du coté du soleil levant pour finir la soirée. Ce blend n’est malheureusement plus disponible et nous aurons eu la chance de pouvoir associer les essences japonaises avec les volutes cubaines.
Couleur : vieil or
Nez : fin, onctueux. Camaïeu de tons dorés, fauves et rougeoyants. Cette sensation est renforcée par des notes de sous-bois, de champignons et de feuilles séchées. Il se développe sur de beaux amers d'agrumes. A noter une petite pointe de vernis agrémentée d'épices.
Bouche : à la fois vive et onctueuse. Les agrumes sont là en premier plan. Ils laissent place à des notes de miel, de bruyère et de fruits confits (poire, pomme). Salé, le milieu de bouche est également marqué par la réglisse et les épices douces (gingembre, cannelle, muscade). Elle se développe sur le cuir, le toffee et la crème de marron.
Finale : longue, gourmande. Des notes de tabac blond et de lichen soulignent son caractère végétal. Elle alterne ensuite entre le miel, la bergamote, la confiture de coing et les fruits secs (amande, noix, datte)